Voici une des plus grosses objections que je reçois de mes nouveaux lecteurs :
« OK ok, je comprends les arguments de Monsieur Money Moustache. C’est une bonne idée, sur le papier, de dépenser moins que ce qu’on gagne. Mais MMM est un peu trop hardcore. Je ne suis pas encore prêt à vivre une vie d’ascète, et à me priver de tout pour que ma famille subsiste avec moins de 25 000 euros par an ! »
Cette récrimination revient encore et encore, même si je passe mon temps à répéter que la famille Moustache a un niveau de vie plutôt indécent, sans aucune privation financière. Les gens ne me croient simplement pas, et ils n’ont pas le temps de lire les articles qui expliquent toute la situation.
Alors, j’ai fait ce petit résumé pour vous montrer à quoi ressemble vraiment la vie quand une famille avec enfant vit avec moins de 25 000 euros par an en retraite anticipée. Comme cela, à chaque fois qu’on me rabâche à quel point je me prive pour vivre ainsi, je n’aurai qu’à donner le lien de cet article.
Avertissement : SVP, ne prenez pas cet article comme un encouragement en faveur du matérialisme et des dépenses excessives. Mon objectif n’est SURTOUT pas de dire « Hey ! Regardez tout ce luxe dans lequel nous vivons ! »
Au contraire, c’est avec un peu de culpabilité que je montre les photos dans cet article, parce que tout cela est loin de l’idéal minimaliste que recherchent les personnes les plus heureuses du monde. Tout ce que je peux faire, c’est vous dire « voilà où on en est aujourd’hui ; clairement c’est au-delà du strict nécessaire ; et au fil du temps, on réalise qu’on a besoin de moins en moins de choses, et non pas l’inverse ».
C’est parti – dans le style « Magazine », voyons ensemble chaque aspect de notre style de vie, avec une photo et une description, puis quelques notes pour expliquer comment on tire le maximum dans chaque domaine tout en réduisant les dépenses. Parce qu’après tout, ce n’est pas la quantité dépensée qui compte, c’est l’efficacité de cette dépense pour nous rendre plus heureux.
La Maison
C’est l’élément le plus onéreux de notre budget, car nous vivons dans une maison de 240 m2 qui vaut environ 320 000€, dans une ville où la moyenne est à peine de 160 000€. Ici, un tel budget vous permet d’acquérir une maison avec 4 chambres dans le meilleur quartier de la ville.
Notre maison a quatre salles de bains, y compris une suite parentale sortie tout droit d’un magazine de décoration d’intérieur. Toutes les commodités de la ville, un marché de l’emploi fleurissant, ainsi que des lignes de bus régulières et rapides vers les villes environnantes, sont accessibles à pied.
Comment on économise sur cette dépense : Nous avons acheté cette maison pour environ 280 000 euros il y a six ans environ. À l’époque, il était clair que le prix était 40 000 euros en-dessous de la vraie valeur de la maison, parce que (1) le vendeur était pressé, et (2) l’agent immobilier ne connaissait pas le marché local. Nous avons visité la maison le jour même où elle a été mise sur le marché, et nous avons fait une offre d’achat avant la tombée de la nuit.
Depuis, j’ai passé près de mille heures à rénover la maison et ajouter des améliorations : du vrai parquet à la place des tapis, un joli carrelage à la place de la douche en plastique, et d’autres détails qui me rendent fier de la baraque. Tout cela ne nous a pas coûté grand-chose, puisque la menuiserie est un de mes hobbies ; pour moi c’est plus du loisir que du travail. Cela veut dire aussi que la maintenance et les réparations ne nous coûtent presque rien ; je trouve les matières premières sur LeBonCoin et la main-d’oeuvre est gratuite.
La maison est à un emplacement stratégique : la taxe foncière nous coûte seulement 1 900 euros par an. Une conception intelligente des ouvertures et de l’isolation, associée à un climat ensoleillé mais tempéré, nous permet de ne pas sortir plus de 360 € par an en chauffage et en clim’. Puisqu’on surveille notre consommation électrique et que le coût local de l’électricité est raisonnable, nos factures électriques ne dépassent pas 25 euros par mois. Est-ce que cela coûte beaucoup plus cher de se loger, là où vous vivez ? J’avais le même problème – j’ai dû déménager et venir vivre ici exprès pour trouver la combinaison parfaite de qualité de vie et de prix raisonnable.
Les loisirs et gadgets :
On a tous les gadgets nécessaires. Et même trop de gadgets.
- 5 ordinateurs performants partageant une connection sans fil haut débit et pleins à craquer de films et de musique.
- Un home cinema au sous-sol avec un videoprojecteur permettant de visionner des films sur un écran de 3.5m de diamètre.
- Un système stéréo avec une qualité de musique parfaite, et cinq autres systèmes multimédia pour écouter de la musique partout dans la maison.
- Un ensemble de batterie 1994 avec les finitions en érable verni.
- Deux guitares.
- Des micros et des tables de mixage.
- Un Didgeridoo du feu de dieu acheté en Australie, directement des mains de l’artisan aborigène qui l’a sculpté, et qui m’a appris à en jouer.
- Un atelier de menuiserie suffisamment complet pour construire une maison entière à partir de rien.
- Une véritable Caverne d’Ali Baba de jouets éducatifs pour notre petit garçon.
- Six bicyclettes (*)
- Un kayak gonflable Sevylor.
- Du matériel de camping.
- Tout l’équipement sport et de muscu dont j’avais toujours rêvé.
- Un équipement complet de snowboarding.
Trop, trop !
Comment on économise là-dessus :
À l’âge avancé de 37 ans, je commence à sentir le poids des années. Cela fait 17 ans que je gagne un revenu d’adulte (et/ou un revenu passif de mes investissements), et chaque année j’ai été tenté d’acheter encore davantage de ces accessoires de luxe.
J’ai fait la plupart de ces achats sur Leboncoin ; les autres ont été hérités d’amis ou de membres de la famille, ou encore de locataires qui les ont abandonnés dans notre maison. Certains ont été troqués contre des objets dont nous n’avions plus l’utilité. Et enfin, pour le reste, j’ai fait mes recherches pendant des mois, et comparé les prix de plusieurs magasins avant de me décider. Tous nos gadgets sont de plutôt bonne qualité ; du coup ils n’ont pas tendance à casser souvent, ce qui veut dire qu’on a tendance à les accumuler au fil des années.
Je ne suis pas fier d’avoir accumulé tout ce barda. Si je vous montre tout ça, c’est juste pour vous permettre de comprendre qu’on ne vit pas une vie de privation.
Vivre dans une des plus belles régions du monde
La famille Money Moustache vit, en toute objectivité, dans l’une des plus belles régions du monde. Le comté de Boulder, dans l’état américain du Colorado, est à la frontière des Montagnes Rocheuses, et un climat constamment ensoleillé illumine les rivières étincelantes issues de la fonte des glaciers.
Vous pouvez débouler de votre garage sur votre vélo et vous retrouver en quelques minutes dans un canyon surplombé de falaises de 600m de haut de chaque côté, en pédalant le long d’une rivière, en faisant signe de la main aux alpinistes suspendus dans le ciel autour de vous comme autant de minuscules fourmis. Continuez un peu la balade, et vous pouvez poser votre tente en plein milieu de la nature sauvage, sans la moindre trace de civilisation autour de vous.
Et pourtant, vous êtes en fait entouré de villes et de petites communes qui vous mettent à portée de main la plus riche économie du monde, avec une quantité minime d’impôts et de réglementation. Malgré tout cela, la vie ici ne coûte presque rien par rapport aux salaires qu’on peut gagner, puisque la nourriture et le logement sont bon marché et il y a des terrains à prendre pour tout le monde. Comme beaucoup d’endroits dans mon pays, cet endroit est de la Pure Liberté distillée sous forme de paysage.
Comment on économise :
Nous ne nous sommes pas installés dans la ville même de Boulder (où une maison comme la mienne coûterait plus d’un million !!) – mais simplement 20 km plus loin, à Longmont. C’est une ville nettement moins « à la mode », et les riches habitants de Boulder nous raillent constamment, en imaginant que notre ville à nous doit être un vaste terrain vague rempli d’éleveurs de bétail et de dealers de drogue. Mais ils ont complètement tort : je vis ici depuis six ans et je ne suis entouré que d’arbres majestueux, de rivières limpides, de gens authentiques et de familles heureuses. Et on a même un peu de l’effet « hipster » qui commence à se développer, si j’en crois le nombre croissant de Beach Cruisers, de Subarus, de barbichettes, et de micro-brasseries.
Nos vacances :
Quand votre vie change, vos habitudes de voyage évoluent aussi. Quand nous avions la vingtaine, ma femme et moi avons visité pas mal d’endroits : l’Australie, la Nouvelle-Zélande, l’Italie, Hawaï, le Mexique, et bien sûr le Canada et une grande partie des États-Unis. Maintenant que nous avons un bout de chou de six ans, nous restons un peu plus tranquilles en visitant principalement le nord de l’Amérique. Mais cela ne veut pas dire qu’on reste bloqué à la maison. Même à son jeune âge, notre fils a déjà vu quatre pays différents et 20 états des États-Unis. Nous passons environ 3 mois par an à voyager et prévoyons d’en faire davantage quand il sera plus grand.
Comment on économise :
Madame Money Moustache adore planifier nos voyages. Le voyage est une de ses passions, et c’est pourquoi on en fait autant. Elle passe Internet au peigne fin pour dégoter les meilleurs plans pour les vols et les hôtels. On utilise des cartes de crédit qui rapportent des bonus, pour obtenir des vols gratuits et des ristournes. On voyage parfois en prenant la route dans notre petite voiture économe, on amène nos propres repas, et on fait du camping dans la Nature pour certaines de nos vacances aux USA. On n’est pas du tout tentés par les voituriers, les cocktails à 20 euros, et les restaurants à 100€ le menu, mais on est CARRÉMENT impressionnés par les montagnes de 4 500m d’altitude, les récifs de corail, les parcs nationaux et les plages peu touristiques.
Nos Voitures :
Je parle de vélos tout le temps, alors je dois être une de ces personnes bizarres qui ne touchent jamais à une voiture non ?
Eh non ! Au contraire, j’adore les voitures et je suis secrètement un fan de moteurs. Si mon bon sens ne me retenait pas, j’achèterais carrément une Tesla Roadster (une des voitures les plus rapides du monde), et une monstrueuse BMW 335d GT familiale diesel pour les balades à trois, et aussi un Fourgon Mercedes Sprinter personnalisé pour en faire un camping-car lors des longs voyages.
Comment on économise :
Eh bien en fait, je me suis forcé à regarder la réalité en face : les voitures chères sont un énorme trou dans le portefeuille et n’amènent aucun bonheur durable, donc je me concentre sur le bon sens plutôt que sur le luxe. Nous avons une Scion xA (surnommée Xéna) âgée de 7 ans pour la plupart de nos rares excursions en voiture, et j’ai aussi un miniman Honda Odyssey (« La Mujer Azul ») âgé de 13 ans pour transporter les outils et le bois pour mon hobby de charpentier à temps partiel. La Scion nous transporte dans un confort absolu pour moins de 6 L aux 100km. Le van est occasionnellement utilisé pour nos voyages en camping, et apprécie la balade.
On a choisi d’acheter ces deux véhicules d’occasion, et pourtant ils sont encore dans un état quasi-neuf et ne sont jamais tombés en panne ou quoi que ce soit de ce genre à part changer l’huile et les essuie-glace. Une des raisons de cette longévité : nous conduisons moins de 11 000 km par an, et en général pour de longs déplacements sur l’autoroute. Malgré une valeur de revente totale inférieure à 9 600€, ces deux véhicules sont bien plus que nécessaire pour notre famille.
L’Alimentation :
Ah, le luxe de la bonne chère. On n’en a pas besoin pour être heureux (je vivrais facilement en me contentant de riz, fruits et légumes), mais on se permet tout de même d’acheter de la nourriture raffinée chaque semaine et de se donner à fond pour en faire des plats attractifs. On invite des amis chez nous pour faire la fête, et nous les nourrissons avec plaisir de ces aliments chers et bons. La plupart de nos ingrédients sont bio, et sans gluten du fait des préférences de ma femme. Tout cela coûte plus cher en théorie. J’apprécie et j’adore, mais c’est bien plus que nos besoins de base, donc je me permets de le dire franchement ici ! Bon appétit !
Alors, qu’est-ce qui manque dans notre vie ?
Beaucoup de lecteurs qui sont nouveaux sur ce blog, font le calcul de leur propre budget et se rendent compte qu’il est bien plus élevé que celui de la famille Moustache. Alors que faisons-nous de si différent, pour avoir un style de vie apparemment normal pour un budget si léger ?
Ce qu’il faut remarquer avant tout, c’est l’absence d’une catégorie « Divers » dans notre budget. Nous avons beaucoup de « choses », mais que nous avons acheté une seule fois, et en général il y a longtemps. Je passe souvent des mois sans ressentir le besoin de visiter le moindre magasin à part pour les courses alimentaires et mon matériel de menuiserie. On n’achète pas de chaussures à talons et de massages au spa, et on mange au restaurant peut-être une fois par mois en moyenne.
L’autre facteur, c’est qu’on évite de prendre la voiture. On conduit uniquement quand il faut se rendre dans une autre ville, ce qui arrive peut-être une fois tous les dix jours. Pas d’aller-retours au magasin, pas d’aller-retour pour aller au boulot en semaine, et surtout pas de voiture juste pour le plaisir de se balader. C’est à ça que servent les VÉLOS !! Ce paragraphe, à lui tout seul, peut diviser par deux votre coût de vie.
Et enfin il y a l’éducation de notre fils. Avoir un seul enfant est, bien sûr, moins cher que d’en avoir plusieurs – les dépenses liés à notre fils sont en moyenne de 240 euros par mois au cours des 6 dernières années. Mais il y a aussi une grande marge de manœuvre sur la quantité d’argent que vous dépensez en tant que parent, et dépenser davantage ne fait pas forcément de vous un meilleur parent. J’appelle cela « éviter le syndrome des Grandes Petites Écoles« .
Et enfin, vous remarquerez que nous n’avons pas de remboursement de prêts. Je n’ai jamais eu de dettes, à l’exception d’une année de folie automobile quand j’étais jeune et de quelques années à rembourser le prêt sur une maison. Un style de vie comme celui mentionné ici pourrait facilement coûter 50 000 euros ou plus par an si vous sautez à pieds joints dans un prêt à la consommation pour toutes vos dépenses. Mais en possédant les choses que vous utilisez, la vie devient bon marché.
Bien sûr, être vraiment propriétaire de ses affaires, ce n’est pas gratuit non plus : à part les dépenses mensuelles, il y a aussi de l’argent « bloqué » dans votre maison et les objets que vous avez. Si on vendait tout, et qu’on vivait dans une maison de location, et qu’on louait nos voitures, vélos, et meubles, alors notre coût de vie serait proportionnellement plus élevé. Mais au final, c’est l’un des deux éléments nécessaires pour économiser et financer votre style de vie :
- Les choses que vous possédez, point barre (en faisant le total de tout ce dont j’ai parlé dans cet article, environ 320 000 à 400 000 euros, la majorité correspond à la maison)
- Les investissements que vous possédez (actions en bourse, obligations, immobilier, petite entreprise, etc.) qui paient vos dépenses annuelles. Pour vivre avec 23 000 euros de dépenses par an, en utilisant la Règle des 4%, il vous faudra 575 000 euros d’économies que vous investissez. (Comme je possède un bien locatif, qui me rapporte des revenus supérieurs à la règle des 4%, j’ai besoin d’encore moins que cela pour bien vivre)
Autrement dit, un style de vie comme le nôtre peut être le vôtre aussi, de façon durable, avec un peu moins de 1 million d’euros d’économies, sans plus jamais avoir besoin de travailler. Un million d’euros, ça vous dit quelque chose ? C’est un montant qui semblait énorme dans le passé, mais tout le monde dit aujourd’hui que c’est insuffisant pour prendre sa retraite. Mon argument à moi, c’est que c’est beaucoup plus que vraiment nécessaire.
L’Avenir :
La vie est pleine de surprises, et je suis impatient de voir ce qu’elle me réserve. Nous sommes encore des débutants dans cette vie de jeunes retraités (même si on travaille encore pas mal pour le plaisir). Et il reste encore dans notre vie pas mal de traces de notre ancienne vie de consommateurs.
Sur le long terme, j’aimerais vivre une vie plus simple dans une maison plus petite avec moins de « choses » autour de moi. À mesure que notre garçon grandit, on veut qu’il soit plus impliqué dans des activités de travail et d’aventure, pour qu’il ne grandisse pas en prenant cette abondance matérielle comme un acquis. Alors même si les haters continuent d’accuser la famille Moustache de vivre une vie trop frugale à leur goût, vous allez sûrement constater qu’on continue à simplifier notre vie. Même si les revenus financiers et le bonheur augmentent avec le temps, les dépenses excessives et le matérialisme peuvent s’effacer si vous choisissez ce qui compte vraiment pour vous.
* Après lui avoir lu cette partie de l’article, mon fils m’a informé que je devrais compter sa nouvelle bicyclette dans le total et m’assurer de l’inclure dans la photo. Donc, correction : nous avons sept vélos et pas six.